Réussir sa dissertation en français cours et sujets corrigés
À propos de la leçon

3 FORMULER LE PROBLEME, ANNONCER LA PROBLEMATIQUE

Enfin, il conviendra de problématiser l’énoncé, c’est-à-dire de formuler le problème en fonction de la démarche adoptée, sans lui fournir de réponse anticipée (réponse ou «solution» à réserver pour la conclusion); et, le cas échéant (si la formulation du problème ne suffit pas), d’annoncer la problématique en suggérant le plan-cadre (exemple n° 1: 3).
Dans certains cas, si une limitation du champ d’investigation s’impose, on annoncera clairement à quelle(s) restriction(s) on soumettra le traitement du sujet (exemple n° 2: 3).

Tous ces jalons permettront au lecteur de bien cerner le fil conducteur du travail (c’est-à-dire le problème à raiter) et de repérer plus facilement la démarche adoptée et la structure générale du développement, ou son mouvement (c’est-à-dire le plan-cadre).

Exemple n° 1:

Enoncé: «L’égalité est donc à la fois la chose la plus naturelle et,
en même temps, la plus chimérique.
»

(Voltaire)

Thème: l’égalité
Exemple d’introduction possible
(démarche dialogique):
1) «Liberté, égalité, fraternité»: la devise des Français date de la Révolution. Mais c’est grâce au travail philosophique des Encyclopédistes, tout au long du XVIIIème siècle, et en particulier grâce aux écrits, aux courageux combats pour la justice et l’égalité de Voltaire ou de Rousseau, que pourront être formulés les idéaux de 1789.
2)Pourtant, Voltaire lui-même estimait que «l’égalité est à la fois la chose la plus naturelle et, en même temps, la plus chimérique»: à son époque, il pensait encore que l’égalité en matière politique, civique et sociale n’était qu’une utopie. Mais les temps ont changé: aujourd’hui sa reconnaissance théorique figure en tête de la charte des Droits de l’homme.
3) En est-elle pour autant acquise? Il est permis d’en douter…
Nous allons tenter de faire le point sur la question, en mesurant les acquis du combat pour l’égalité depuis Voltaire, ce qui reste à accomplir pour changer l’utopie en réalité, et les chances qu’a ce combat d’aboutir.

Exemple n° 2:

Enoncé: «Les héros tragiques sont des êtres hors du commun, sur lesquels pèse une mystérieuse culpabilité, des individus qui entrent en conflit avec les dieux, avec les autres
hommes et avec eux-mêmes. Ils expriment de façon exemplaire l’énigme et le scandale de la condition humaine telle qu’elle est: grandeur et misère».

Commentez et illustrez cette opinion d’un critique en l’appliquant à l’Andromaque de Racine.
thème: grandeur et misère des héros tragiques

exemple d’introduction possible:
(démarche herméneutique – dissertation littéraire)
1) Grandeur et misère: pour Blaise Pascal, moraliste du XVIIème siècle acquis à la doctrine janséniste, ces deux termes résument la condition humaine. La Chute nous a séparés de Dieu, nous a voués au péché, à la misère et au malheur (ce d’autant plus que l’âme humaine se souvient de ce qu’elle a perdu); mais «penser fait la grandeur de l’homme».
2) C’est au cours du même siècle que Racine, dont l’éducation fut elle aussi marquée par le jansénisme, écrit Andromaque, sa première grande tragédie. Elle nous servira d’illustration aux propos de ce critique affirmant que les héros tragiques sont à la fois des «êtres hors du commun» capables de s’affronter aux dieux, et des êtres misérables, marqués par la culpabilité, en lutte avec les autres et avec soi, c’est-à-dire pris dans «l’énigme et le scandale de la condition humaine».
3) Nous nous concentrerons plus particulièrement sur le personnage éponyme d’Andromaque pour montrer en quoi consiste sa grandeur; puis nous dirons en quoi son destin tragique suscite également notre pitié, tout en rejoignant notre humanité

/!\Attention!

On évitera:
• de multiplier les questions à traiter en proposant un programme impossible à réaliser dans le temps et l’espace (ou le nombre de pages) impartis;
• d’annoncer des points que le développement n’abordera pas ensuite – à moins de préciser qu’on va restreindre délibérément le champ de la problématique en opérant des choix;
• d’aborder dès l’introduction la discussion même du problème (à réserver pour le développement);
• d’anticiper sur la résolution du problème soulevé par l’énoncé (car alors, le lecteur n’éprouverait plus le besoin – ni l’envie! – de poursuivre la lecture);
• d’annoncer le plan du développement avec une pesanteur… éléphantesque!

Remarque
Les trois étapes que nous avons distinguées pourront très bien aussi se présenter dans un autre ordre de succession – l’essentiel consistant non pas à reproduire servilement un modèle, mais à imaginer une introduction remplissant, de manière originale, les trois fonctions distinguées.

Exemple:
Enoncé: «La raison du plus fort est toujours la meilleure.»
(J. de La Fontaine)

Développez et illustrez cet aphorisme de l’auteur des Fables.

Exemple d’introduction possible:
(Démarche herméneutique)

2) Comme le suggère La Fontaine dans sa fable Le loup et l’agneau, le droit n’est souvent qu’un prétexte de la force. 1) Ainsi, au moment de la guerre du Kosovo, tandis que se multipliaient les bombardements de l’OTAN, le philosophe Alain Badiou demandait: «Qui peut croire une seule seconde que le but de guerre des Américains soit le Droit, la Justice ou l’Humanité?», cherchant à dénoncer par là le décalage qui peut exister entre les buts de guerre allégués par les puissants et leurs véritables mobiles.
3) Sans nous prononcer sur ce cas précis, nous observerons qu’en effet le fameux aphorisme du fabuliste – «La raison du plus fort est toujours la meilleure» – se vérifie bien souvent. C’est ce que nous allons tenter de démontrer et d’illustrer.
Dans ce cas, l’étape 1) et l’étape 2) ont été inversées. L’introduction commence (étape 2) par une reformulation du propos, puis (étape 1) recourt à un exemple (accompagné d’une explication) visant à actualiser le propos; le propos lui-même (cité entièrement) n’intervient qu’à la fin de l’introduction, avec (étape 3) l’annonce de la démarche adoptée (herméneutique), selon ce qu’exige la consigne. Ainsi, bien que dotée d’une structure atypique, cette introduction est parfaitement pertinente, parce que les trois fonctions essentielles y sont respectées.

Remarques générales

• Toutes les suggestions qui précèdent définissent l’esprit de l’introduction. Mais elles ne constituent pas des règles absolues, comme le montre l’exemple ci-dessus. L’important est que, d’une façon ou d’une autre, les trois fonctions essentielles de l’introduction soient remplies.
• La longueur de l’introduction sera proportionnelle à celle de la dissertation. L’usage veut que l’introduction constitue environ 10 à 15% de l’ensemble.
• Afin de garantir la meilleure cohérence possible à l’ensemble de la dissertation, il sera souvent préférable de recopier la version définitive de l’introduction après avoir écrit le développement, ou du moins après avoir élaboré le plan-cadre du travail.

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